Tu me manques et je ne savais pas que tu me manquerais. Mais je suis parti, maintenant, loin de toi, et je réalise que malgré toutes les belles intentions, il est possible que je ne te revoie pas. Plus. Jamais. La vie est ainsi faite, elle vous devient trop courte au moment où vous commencez à deviner quoi en faire. Alors voilà, parce que j'étais trop idiot pour prévoir le vide que tu me laisserais, je dois désormais te faire des adieux de lâche, le dos tourné, à tant de kilomètres... Oh, je sais, ce n'est pas strictement impossible qu'on se recroise un jour, au détour, si la chance me sourit encore. Mais je préfère ne pas vivre dans cet espoir flou et déchirant chaque fois que je penserai à toi. Tu es derrière moi, ce que j'ai vécu avec toi restera, et je continue ma route. Au fond, c'est peut-être mieux que je ne comprenne que trop tard qui tu étais vraiment... Je suis désormais ailleurs, avec une autre, et j'ai assez de lucidité pour me rendre compte que, malgré toutes les émotions que tu m'auras montrées, je n'ai pas vraiment connu d'amour pour toi. Tu n'étais seulement qu'une aventure, comme dit la chanson, mais elle était douce et sereine, facile. Je n'aurai donc pas eu d'attentes, de celles qui vous poussent ensuite au cynisme, en te rencontrant, en te fréquentant. J'aurai vu le peu que tu m'auras donné de toi, et cela me suffira pour m'offrir encore et longtemps bien des souvenirs tendres.
D'ailleurs, je n'oublierai jamais ton parfum.
Oui, s'il y a bien une chose dont je me souviendrai, c'est qu'après la Chine aux odeurs, à prédominance minérale, de soufre, de compost de citron et d'oignon, d'oreilles de christ, de soya, d'essence, de pierre, de fenouil, de maïs, de sésame grillé, de légumes craquants, de beignets, de menthe et de thym, d'huile et de charbon de bois... et le Népal, aux notes typiquement animales, et ses effluves de cire d'abeille, de cardamome, de feu de bois, de genévrier, d'encens, de thé, de cumin, de sang frais et de beurre un peu rance... eh bien toi, tu sentais vert, vert végétal. Vert tendre, vert forêt, vert d'eau, vert kaki (celui des Crayola qui restait intact), mais vert. Vert, vert, vert. Vert avec un peu de poussière, peut-être. Même ton poisson avait ce petit arrière-goût, parfois pas désagréable, d'algue de rivière...
Tu es derrière moi, Laos, ainsi que ton parfum de vert.
10 commentaires:
Je suis votre blog depuis maintenant...quelques mois.
Il est vraiment magnifique, tel votre aventure, d'ailleurs.
Coup de coeur pour ce billet, fort beau.
Merci!
Bien sûr notre cœur balance entre les amours de jeunesse, deux d'ailleurs,ceux des moments inoubliables...C'est bien ça le voyage, mourir un peu à ce que la route nous contraint à laisser derrière soi. Mélancolie, spleen, syndrome de Stendhal... il n'y a pas de mot pour décrire cela si ce n'est la poésie. Et vraiment, tu le fais très bien.
Tu m'as donné le goût de boire un thé vert...
*soupir* une si belle lettre d'adieu...
"Vert"! Pourquoi pas. Mais pour moi votre parcours laotien me laisse des sensations très aquatique avec ce majestueux Mékong... que vous aurez le bonheur de retrouver encore et encore sur votre route et ces splendides levers et couchers de soleil.
Kenavo
Vous m'inspirez beaucoup...
Un jour, dans ma vie j'irai au Laos! Et si ça n'arrive pas, je ne m'appelle plus Mariane Pilon!
Une chose est certaine, c'est que vous avez vraiment une belle plume.
Mariane
La mémoire olfactive n’est-elle pas une des plus puissantes qui peut faire resurgir les émotions précises vécues même plusieurs années auparavant? Vous n’avez pas fini de sniffer et de vous remémorer ses souvenirs ô combien inoubliables! J’ai encore souvenir du savon qu’utilisait ma mère dans notre bain... l’odeur la plus marquante jusqu’à ce jour fut la montagne d’orange en train de brûler en plein cœur de Bamako, eurk… Vous avez demandé quoi au Père Noël?
Cathyxx
Michel...Je suis maintenant amoureuse du Laos...Quel don tu as pour faire passer l'amour , par -delà les mers, pour toucher nos coeurs de ta plume de poète.
Merci
Annie Bergeron
p.s Vous me manquez xxx
monsieur Sardi, vous savez que quand je lis cette lettre que vous dédicassez au Laos je pense et repense à l'année passé quand vous nous lisiez différents textes. Je me souviens de tout ça et quand je vous vois dans certains billets précédents jouer de la guitare à des jeunes enfants je me met à leurs place. J'étais assis devant et je me laissais guider par votre lecture. Ça ma si bien marquer que je suis devant mon ordinateur 2h du matin sans pouvoir m'empêcher de vous écrire pour que vous ayez une pensée pour moi à l'instant où vous lirez ceci. Merci pour tout, votre capitaine de`l'équipe de football des citadins 2010 qui est fulllll frais et qui se la crois, j'espère vous faire deviner qui je suis.
À très bientôt
Salut Capitaine!
Difficile d'oublier celui qui avait collé une jolie phrase poétique sur mon bureau lors de l'opération notocollants!
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