Les yeux débridés?

20 juin 2011

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Cela faisait un bon moment qu'on attendait de trouver un titre à notre blogue avant de le mettre en ligne.
C'est que, pour nous, c'est une partie intégrante du voyage.

D'abord, en fréquence, la troisième question qui nous est posée sur notre projet c'est: «Pourra-t-on vous suivre?»
Mais oui, que nous répondons invariablement. Et c'est bien une de nos volontés les plus chères: de pouvoir partager avec vous ce que nous vivrons, à travers l'envie et le besoin d'écrire qui se manifestent déjà. (Les deux premières questions en fréquence sont: «Vous amenez les enfants?», puis «Et ils vont manquer une année d'école?» Nous y reviendrons ici, vous vous en doutez bien.)

Ainsi, on cherchait un titre signifiant doté d'une touche ludique, à l'image de notre projet. On s'est creusé la tête longtemps. On était jaloux de Marco et Isabelle, un couple de journalistes dont l'expérience, lue sur leur blogue Les baguettes en l'air, nous a fortement inspirés! On en était encore, la semaine dernière, au quétaine quoique mignon Dis-moi en Asie... Mais ce n'était pas exactement ce qu'on voulait, et on s'entend que le jeu de mots était un tantinet gnangnan. Laurence, on peut faire mieux, non?

Puis Les yeux débridés. Soumis à la sanction éditoriale de Laurence, c'est un coup de cœur immédiat, même confronté au finaliste latinisant (et donc très séduisant pour moi...) Asia jacta est (que nous avons toutefois conservé comme titre de notre premier billet).

Coup de cœur, et pour cause. Parce que ces trois mots peuvent en dire long.

Les yeux débridés. On percevra sans doute le sens figuré en premier, c'est-à-dire le contraire des «yeux bridés», car l'acception officielle de l'adjectif débridé se révèle toute autre. Mais, bon, s'il fallait toujours suivre les règles... nous ne partirions pas!
Ainsi, si c'est le jeu de mots que l'on lit d'abord, il n'en demeure pas moins qu'il soit évocateur: une allusion directe à notre qualité d'autre sur le sol asiatique. Bien que cette différence physionomique ne soit pas présente dans tous les pays que nous prévoyons visiter, l'image est suffisamment claire:
Nous serons l'autre. Pour l'autre.
Et c'est beaucoup pour cela que nous partons. À la rencontre de cet autre, qui nous rapprocherait paradoxalement de nous-même.
(Sur ce thème de l'autre, et sur les motifs du départ, nous reviendrons probablement abondamment.)

Mais c'est au delà du jeu de mots que le titre prend tout son sens. Au sens propre (et très beau par ailleurs, même s'il s'agit de la règle), Les yeux débridés sont des yeux déchainés, sans ambages. C'est dans cet état d'éveil effréné que nous aimerions nous trouver tout au long de notre aventure. Et ce seront des yeux synesthésiques, évidemment, car nous souhaitons que tous nos sens se trouvent ainsi sans contrainte, prêts à être sollicités, puis ravis.

Poussons plus loin?
Dans certaines villes d'Asie, en plus des crèmes blanchissantes pour la peau, des services de chirurgie esthétique offrent de «dé-brider» les yeux... histoire de permettre au plus grand nombre de se conformer aux diktats de la soi-disant beauté occidentale. «Pardon, un peu plus à l'Ouest», comme dirait l'autre...
Notre titre évoque donc aussi la réflexion nourrie sur la fusion des cultures d'Orient et d'Occident, ou sur leur choc, c'est selon. Et les notions de choc comme de fusion ramènent à des concepts physiques, évidemment!, assez puissants. Nous ne doutons pas que nous les ressentirons ainsi parfois: physiquement...


Voilà. Nous vous proposons en toute candeur de nous suivre ici. En nous ouvrant follement les yeux, nous essaierons de vous faire vivre un peu de ce que nous verrons, et de partager tout ce qui peut bien se dire par les mots, soit beaucoup. (Bon, vous aurez aussi des images, mais ça sonnait moins poétique.)

asia jacta est

19 juin 2011

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Fin novembre 2010.

«Laurence, on part.»

«D'accord.»


Et c'est tout.

Pas besoin d'autre explication, d'autre raison, d'autres mots.

«C'est un projet de longue date, surement» qu'on nous dit souvent, plus sur le ton du constat que de la question.
Oui, un peu. Et non, beaucoup. Implicitement, on a toujours su qu'on partirait ainsi. Mais on avait vingt ans la dernière fois qu'on avait évoqué l'idée de partir si loin, si longtemps.

Et peut-on même parler de projet? On se jette bien plus qu'on se projette, dans cette aventure...


L'idée est survenue le vingt-et-un novembre.
La journée même, on savait qu'on partait. On ne savait ni où, ni comment, ni pourquoi. On savait quand, c'est ce qui compte. C'était maintenant, il le faut, on le peut.


En décembre, mille lectures: on se décide pour l'Asie.
En janvier, on demande nos congés sans traitement.
En février, une rencontre avec notre banquière. (Qui s'est bien passée, on précise pour rassurer nos mamans...)
En mars, on finalise l'itinéraire puis on achète les billets d'avion.
En avril, on nous accorde nos congés.


Mais en y repensant bien, on a peut-être acheté les billets avant la rencontre avec la banquière, aussi.


Oui, c'est bien cela. On savait à ce point-là qu'on partait.



*


Pourquoi partir? Peu de gens la posent, celle-là. C'est la plus intime des questions.
Si intime que c'est difficile à dire vraiment. C'est trop tôt.

Notre amie Audrey et la sagesse de ses bientôt vingt ans vous diraient que ce n'est pas si grave. Qu'on le saura en chemin. Ou en revenant.

On vous tiendra au courant.


Et pourquoi l'Asie? C'est le titre de ce billet, après tout.
Parce que pas l'Afrique.

C'est à l'Afrique que nous avions pensé, il y a vingt ans. C'est à elle que nous pensions encore le vingt-et-un novembre dernier. C'est vrai que nous enviions ceux qui visitaient le Népal, l'Inde et la Chine, mais c'est la première fois que nous rêvons d'Asie, et la première fois que nous considérons même l'Asie du Sud-Est.

En effet, pour se rendre à l'autre bout du monde au sens propre et figuré, là où nous voulions aller, cette partie du globe était bonne concurrente. Trop bonne. Deux atouts majeurs pour une famille, le coût de la vie et la sécurité (criminalité et maladies), rendaient la destination plus «facile»...

Asia jacta est. L'Asie se substitue merveilleusement bien au sort.

C'est elle qui nous permettra de voir l'autre, l'entendre, lui parler, le toucher, le sentir. Voilà ce que nous allons faire là-bas. Pour comprendre. Pour être. Pour nous, pour nos enfants, pour nos élèves, et pour tous les autres qui passeront dans nos vies .