De la jungle et autres considérations...

29 oct. 2011

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On ne pourra pas dire que nous n’avons pas de la suite dans les idées et que nous ne faisons pas des efforts plus que louables pour accroitre notre condition physique.

Nous étions donc ici, dans le nord du Laos, avec la ferme intention de faire, hé oui, un autre trek à la découverte des minorités vivant dans les trous les plus reculés de la région. Déjà que la ville laotienne (une des plus grosses du pays) dans laquelle nous nous trouvons (au cœur d'une région protégée par le gouvernement), ressemble à un petit village de campagne chinoise, on vous laisse imaginer de quoi peut bien avoir l’air le «hors sentier» laotien. Mais bon, on abuse un peu car les enfants suivent encore sans trop trop gémir en entendant le mot «trek».

Nous voulions cependant, cette fois-ci, faire un peu différent et, en choisissant notre trek, nous avions bien pris le soin de spécifier nos envies. Pas trop de marche dans la jungle (parce que la jungle, on a déjà un peu donné) et plus de temps dans des villages, avec les gens, quitte à rester à la même place deux nuits de suite et à y faire quelque chose d’utile (si possible). Voilà. Super simple, on n’est pas vraiment difficiles pour le reste. On ne cherche pas le coin le plus reculé ni le plus loin, juste le plus ouvert à partager un brin d’eux en échange d’un brin de nous.

Alors, devinez donc ce que nous avons fait la première journée de notre expédition? Hé oui, de la bonne marche intense pendant cinq heures dans la jungle, avec des milliers de sangsues pour nous divertir, en super bonus. Et comme, moi, les sangsues, bien elles m’aiment, j’ai été quitte pour une bonne saignée gratuite! J’ai aussi eu la chance unique de me faire piquer, sur le crâne, par une méga-super guêpe transgénique (ce n’était définitivement pas mon jour), alors disons tout simplement que j’ai vraiment donné le meilleur de moi-même pour continuer la montée vers le village tant convoité. Comme l'a déjà dit mon amie Audrey, j'ai sué ma vie sur ce sentier!



Il y eut tout de même du bon dans cet exercice d’endurance morale. Le repas sur des feuilles de bananiers, entourés de rizières et avec des papayes fraichement cueillies du papayer qui nous faisait de l’ombre restera un souvenir inoubliable, autant que le serpent super venimeux que les guides ont assommé à grands coups de bâton (parait qu’on meurt quelques heures après la morsure, c’était peut-être mon jour en fin de compte). Les guides, d’ailleurs, étaient tout simplement géniaux! Ils ont amusé les enfants (et les grands) avec des tas de trucs qu’ils ramassaient sur la route. Ils ont fait des flutes, des animaux, des sifflets en bambou, des lances-feuilles en palmier, des bruits avec des feuilles, des jeux d’habileté avec des branches, tué des serpents et des guêpes à la main et manié la machette comme des maitres… Bref, ils étaient vraiment gentils, avenants et multi-tâches! Nous les avons adorés! Merci Singadavong et Phang!


 [NdP: Phang (prononcez: Peng), alias tueur-de-guêpes-du-plat-de-la-main, qui tue ici un genre de concombre orange. Moins glorieux; plus délicieux.]

Lorsque nous sommes arrivés au village, on était cependant un peu déçus. On voulait voir des gens (but avoué de notre trek) et le village Hmong était désert. Au fait, le village, c’était une vingtaine de maisons espacées sur des hectares de terrain rocailleux et en pente (ça prend une bonne heure pour faire le tour du village). De plus, nous logions dans une cabane de paille (la maison des invités), en retrait de tout. Bon, qu’on se comprenne bien, on ne s’attendait surtout pas à un comité d’accueil en costume traditionnel. On comprend aussi un peu les villageois de faire autre chose et de ne pas nécessairement tripper de voir débarquer des gens dans leur patelin. Mais, ici, une bonne partie de l’argent des quelques trekkeurs est véritablement redistribué dans les villages (ce que nous apprécions vraiment). Ça ne me dérange pas qu’ils ne veuillent pas nous voir, mais dans ce cas, faut être cohérent et ne pas non plus vouloir l’argent des touristes. Bon, ceci dit, nous avons tout de même fait le tour du village, fait peur à quelques enfants en passant et donné l’envie à quelques villageois fantômes de s’encabaner à triple tour en nous sentant venir. À la suite de cette «promenade», on se demandait bien ce que nous pourrions faire dans ce bled, le lendemain. 



Après le souper habilement concocté par nos guides (faire trois plats différents avec une seule casserole sur le feu de bois, au centre de la cabane de paille, dans le noir, chapeau!), nous nous sommes couchés sur un genre de plate-forme en bois (ouille!). Tout allait relativement bien (si on excepte les éventuelles plaies de lit), jusqu’à ce qu’un méga-orage éclate (pas du tout dans le planning, celui-là). En moins de quelques minutes, on s’est retrouvés sous la pluie qui inondait les paillasses. Au fait, ce sont surtout les guides qui ont écopé ainsi que Michel et moi. Nous étions alors quittes pour nous rouler en petites boules microscopiques, dans un coin moins humide et à ne pas vraiment fermer l’œil de la nuit, position inconfortable oblige. Du coup, on s'est vraiment demandé ce qu'on faisait là.

Et il a plu toute la nuit. Au petit matin, il a fallu faire des choix. Comme il pleuvait, nous n’envisagions pas vraiment d’aller aux champs (deux heures de marche depuis le village) avec les gens. Nous pouvions tout de même attendre que les villageois qui y étaient reviennent et ensuite passer une autre nuit à la même place. Nous pouvions aussi marcher cinq heures, dans la jungle, pour nous rendre dans un camp de chasseurs et dormir directement dans la nature. On pouvait aussi marcher également six heures, dans la jungle toujours, pour nous rendre dans un autre village et y passer la nuit suivante. Et on pouvait aussi, tout simplement, écourter notre trek d’une journée et prendre la petite route (étroit chemin de terre battue) des motocyclettes qui nous ramènerait assez aisément à la ville en quatre heures, sans passer par la jungle. Nous avons tergiversé un peu sans trop savoir quoi faire. La perspective de marcher sur des sentiers difficiles et rendus boueux et glissants par la pluie ne nous enchantait pas plus qu’il ne fallait. Surtout qu’avec la pluie, c’était la prolifération des sangsues assurée, même les guides ne semblaient pas trépigner de joie. Rester attendre dans le village en se tournant les pouces et risquer d’être encore mouillés une autre nuit n’était pas une avenue plus intéressante que les autres. Nous avons donc décidé (en accord avec Véronique, une belge qui s'était jointe à nous pour cette aventure) d’écourter notre trek et de revenir par le sentier plus praticable et surtout moins sangsués.




[Note du photographe: Ok, honnêtement, avouez que l'élève a nettement l'air plus dangereux que le maitre... (Bon, on passe rapidement sur la précision du carreau.)]

C'est après une démonstration de tir à l’arbalète faite par le chasseur du village (j’ai l’impression de décrire une partie de loup-garous), chasseur qui jouait aussi merveilleusement bien de la feuille (sérieusement, il prenait une feuille et la faisait vibrer harmonieusement sur ses lèvres…j’ai comme l’impression qu’il a passé de longues heures à ne rien faire dans la jungle ce chasseur-là) et un concert de violon laotien (sûrement le truc le plus discordant au monde, mais on s'est bien amusés) que nous avons attaqué tranquillement le chemin du retour.

Et... ce fut vraiment parfait! Le sentier était bordé d’arbres et de cultures diverses, nous avions un superbe panorama sur les vallées, nos guides nous ont gossé des paquets de trucs en bambou, nous avons traversé des plantations d’hévéa, avons pu mettre nos doigts dans le caoutchouc frais coulé (même principe ou presque que pour le sirop d'érable) et, enfin, croisé des gens. C’était exactement le genre de chemin que nous voulions faire.


 [NdP: Catherine et Thomas qui fouillent la récolte quotidienne de caoutchouc]

Vers midi, nous nous sommes arrêtés saluer une famille Hmong qui vivait presque seule, en autarcie, dans un ancien village presque entièrement désaffecté. On a pu jaser avec eux et finalement, suite à leur demande, nous avons mangé notre lunch dans leur maison. Il y avait là les parents et la belle-fille de quatorze ans, belle-fille car elle était mariée, depuis deux mois, avec leur fils de vingt-deux ans! Elle vivait maintenant avec ses beaux-parents et les quatre personnes dormaient ensemble dans le coin dodo de la pièce. On a rigolé avec eux (des gens vraiment souriants) et vraiment ce fut un bon moment. C’est tout de même fascinant de voir des gens qui vivent comme au Moyen Âge, tous dans la même pièce, avec les animaux partout et sans électricité ni eau courante. Nous étions les seconds étrangers qu’ils voyaient, chez eux, de leur vie et ils trouvaient fantastique que nous prenions du temps et de l’argent pour venir les rencontrer, puisque eux ne pouvaient venir dans notre pays. On s’en souviendra.

[NdP: Intérieur de la maison où nous avons diné (détail). Vous repérez l'écureuil?]


À la fin du trek, c’est dans le village d’un des guides que nous avons passé un autre super moment. C’était, encore une fois, exactement ce que nous voulions faire (sans devoir nous taper la jungle délirante en prime). Le guide nous a invités chez lui où une ribambelle d’enfants jouaient. Nous avons cueilli des caramboles directement de l’arbre (vraiment les meilleures que j'ai jamais mangées), avons rigolé avec les enfants qui sont allés (brièvement, une chance!) se cacher dans la maison dès que Michel est apparu sur le sentier (je crois vraiment que c’est la barbe, ici personne n’en porte!) et avons marché dans les rues du village suivi par le cortège de petits. C’est pas mêlant, on y serait restés!

 [NdP: Singadavong (prononcez, genre: Singdabong) et une partie de sa famille élargie.]

[NdP: Ok, soyons raisonnables: je ne terrorise réellement qu'un enfant sur deux.]


À toute vitesse

26 oct. 2011

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[Note du photographe: Si ça ne vous rappelle pas CHiPs, c'est que vous avez moins de trente-cinq ans (allez faire un tour sur DejaView)]


Quelques jours avant notre départ du Québec, j'ai dû apprendre les rudiments de la conduite d'un scooter spécialement pour le Laos. En effet, dans la région où nous nous trouvons présentement, il y a plusieurs routes parfaites pour passer une très bonne journée en scooter ou en motocyclette. Ces routes sont en très bon état et traversent de nombreux jolis villages. De plus, elles sont très peu fréquentées. Nous avions donc l'intention de passer au moins une journée en scooter au Laos.

C'était donc très excité que je me suis couché, avant-hier soir, en apprenant, que le lendemain j'allais enfin conduire pour la première fois sur des routes! J'étais aussi très stressé car mon frère (Olivier) allait être derrière moi. J'avais peur de ne m'être pas assez pratiqué dans le stationnement derrière chez moi avec le scooter très généreusement prêté par Mme Dufresne (mon ancienne professeure de français) et de provoquer un accident qui nous blesserait. J'ai donc eu le privilège de faire plein de rêves où mon scooter n'avançait pas ou allait trop lentement. 

Le lendemain, je m'étais levé tôt pour partir le plus rapidement possible. Je me voyais déjà sur le scooter en train de conduire à toute vitesse. J'avais vraiment hâte malgré ma peur grandissante d'avoir oublié comment conduire. Vers neuf heures, nous sommes enfin allés prendre possession de nos engins. Trois belles motos automatiques nous attendaient devant l'agence de location où nous les avions réservées. J'avais déjà choisi la mienne, je voulais la plus grosse et celle avec le plus de suspension. J'avoue un peu honteusement, que j'avais un sentiment de supériorité chaque fois que je regardais nos scooters côte à côte et remarquant la grosseur du mien.

J'ai eu l'honneur de partir en premier jusqu’à notre guest house, sans Olivier derrière moi, pour voir si je n'avais pas perdu mes maigres capacités. Et heureusement, je n'étais pas SI pire que cela. Mais le vrai test c'est passé quand mon frère à du embarquer sur le scooter. Il faut dire qu'au début ça balançait un peu, mais nous avons vite réglé le problème. Après avoir ordonné à mon frère d'arrêter de gigoter sur le siège, j'ai pu enfin partir pour de bon avec Olivier craignant pour sa vie dans mon dos.

Durant le trajet, Olivier s'est avéré un excellent co-pilote, en m'avertissant chaque fois que j'allais trop vite, me rappelant de me concentrer sur la route, en chantant avec moi et surtout en criant de joie ou de peur dans les tournants où j'allais un peu trop vite. C'est une belle complicité entre le conducteur et le co-pilote qui se forme dans les longues routes désertes comme celle que nous avons faite. Disons que ça crée des liens et des moments que je n'oublierais jamais. Nous nous sommes même promis, qu'un jour nous reviendrons au Laos et partirons pour des jours d'aventures en scooter, juste nous deux.



Le trajet en tant que tel, était vraiment magnifique. Étant obligé de prêter attention à la route, j'ai pu apercevoir plein de choses que je n'aurais jamais vu en voiture : des vaches se promenant au milieu de la route, des villageois récoltant du riz, des enfants te saluant, etc. Nous avons même pu nous arrêter et faire une excursion dans une grotte. Elle était immensément profonde et regorgeait de cristaux, de stalactites et de stalagmites, tous plus beaux les uns des autres. 

Mais rien de peut battre l'extase que l'on ressent lorsque l'on roule, que le vent passe à toute vitesse autour de nous et qu'un magnifique paysage de plantations, de collines et de forêts nous entoure.

Je n'ai pas encore convaincu mes parents d'acheter des motos pour finir notre tour d'Asie, mais je n'ai pas encore dit mon dernier mot. J'espère que l'on va en refaire au moins deux ou trois fois. Jamais je n'oublierais cette première fois en scooter et je crois, qu'au plus grand désespoir de mes parents, que je n'ai pas fini d'en parler. Ne vous étonnez donc pas si, en revenant, je décide de devenir motard et de m'exiler au Laos.


Vraiment, adieu la Chine?

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Jinghong la nuit
Nous quittons la Chine vers le Laos et nous sommes nostalgiques (hé oui, encore). C’est que nous l’aimons bien cette Chine du Sud et que nous avons l’impression qu'il nous reste tant à y découvrir.

Nous savons aussi que nous allons nous ennuyer d’un tas de trucs que nous trouvons ici. Hier, nous marchions, Michel et moi, pour une dernière fois dans les rues animées de Jinghong. On s’est arrêtés pour une dernière brochette de courgettes et un dernier «ordre» de pieuvres grillées. Assis sur des petits tabourets, sur le trottoir, en buvant une bière et en attendant notre commande, nous regardions la vie passer. On était bien.


Les enfants sont sortis tour à tour se promener (en paires) pour aussi faire un dernier tour de ville. La Chine leur a montré à être débrouillards, à ne pas craindre de demander avec des gestes, à gouter des tas de trucs, à ne pas s'offusquer de la saleté et des insectes géants, à ne pas avoir peur... de rien. Je ne sais pas ce qui nous attend pour la suite de ce voyage, mais, chose certaine, nous garderons de cette Chine fascinante cette petite envie d'y revenir et d'y rester encore bien plus longtemps.

[Note du photographe: Sur le Mékong, structure de Jinghong aux formes harmonieuses dont on s'ennuiera (en haut à gauche)]

Cela dit, il y a tout de même une chose que nous ne regretterons pas de la Chine et ce sont les sites Internet censurés ainsi que les difficultés et la lenteur à poster sur le blogue. On espère que ce sera plus simple maintenant!

Quand l’appétit va, tout va

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Même les plus coriaces des aventuriers ont besoin de soutien moral.
Après avoir marché pendant des jours et des nuits, après avoir perdu plusieurs de nos compagnons, après nous être aventurés dans le cœur même de la jungle, rien ne nous était plus hostile que… Le manque de nourriture (ta-tan!).

Bon, on ne manquait pas vraiment de nourriture, mais pour moi c’est une expression qui veut dire : pas de pain, pas de fromage, pas de céréales pour le déjeuner et pas de dessert.
Nous, nous avions : du riz, des légumes bouillis, des nouilles aux œufs le matin et du thé.

Nous n’avions pas peur des bêtes sauvages, pas peur des piqûres empoisonnées, pas peur des clowns méchants. Mais après avoir bravé tous ces dangers, nous revenions, la peur au ventre (littéralement), à l’endroit où nous allions manger…

Encore là, ce n’était pas mauvais du tout… mais manger les mêmes choses tous les repas, tous les jours, je n’étais vraiment pas prêt!

Nous avions un système pour nous aider à marcher et à oublier notre faim. Nous énumérions tous les plats que l’on voulait manger en ce moment, tel que :

La cuisine de Grand-Maman Jenny (en général)
La cuisine de Grand-Maman Brigitte (en général)
Les salades de Marc et David
Les crêpes de Pascale
Les crêpes de Cathy et Marc
Les tartes de Monique 

Ou bien :
Un club sandwich
Un gros hamburger
Des sandwiches au pain pita
Etc.

Bref, il était tel que l’on pouvait nous suivre à la trainée de salive que nous laissions derrière nous. Vous êtes peut être en train de vous dire : « Oui mais vous avez la chance de goûter plein de nouvelles choses et… »
Je vous coupe et je dis : « Vous avez raison, nous goûtons plein de nouvelles choses et c’est super cool. Mais, c’est là que nous nous rendons compte à quel point nous nous ennuyons beaucoup de ce que l’on mange chez nous. Vraiment. »

Et là vous me répondez : … En fait je ne sais pas ce que vous me répondez, c’est un peu à vous de choisir. Mais qu’importe, nous n’allons quand même pas partir une conversation par le biais d’un billet de blogue. C’est donc la…
Fin… de la faim

Battre les sentiers

24 oct. 2011

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Dernière journée de trek. Il fait un temps radieux et une chaleur intense. On dit au revoir à nos hôtes et nous descendons une petite heure vers des chutes dans lesquelles les enfants pourront se baigner un peu. L’eau est froide et les enfants s’amusent surtout à construire un barrage sur la rivière. Après la baignade, le reste de la marche nous fait traverser des rizières toute sèches car le riz vient tout juste d’être récolté. Nous qui souhaitions sortir des sentiers battus, nous avons été servi lorsque Phoebus a du débroussailler le chemin, pendant un bon vingt minutes, en taillant, avec un bambou, dans les hautes herbes. Nous en sommes sortis couvert d’épines et de feuillages! 

Nous avons traversé deux villages Bulang et là, c’est Michel qui a littéralement fait hurler de terreur deux bambins qui jouaient. Il faut dire qu’il est arrivé, un peu en surprise, derrière le camion dans lequel les enfants jouaient, avec sa grosse barbe de deux mois. L’apparition du bonhomme sept heures n’aurait pas fait plus d’effets! Nous avons un peu l’impression d’être des croque-mitaines ici. Il faut dire que le chemin semble vraiment peu fréquenté par des occidentaux.

 [Note du photographe: Enfants qui me fuient, en riant, ceux-ci...]

Malgré l’intérêt de la randonnée, il y avait cependant un petit hic. Nous n’avions pas d’eau potable à boire durant presque tout le parcours (un bon cinq heures!). Les villages n’en vendaient pas (nous voulions des routes moins touristiques, fallait tout de même pas s'attendre à trouver des buvettes à tous les coins) et nous n’en n’avions pas apporté, notre guide nous ayant certifié que nous en trouverions facilement en route. Nous avons donc marché des heures, en plein soleil de midi, avant de trouver un boui-boui qui vendait de l’eau, à la toute fin du trek! Les enfants ne se plaignaient pas trop car sur la route nous avons tout de même trouvé des genres de boissons jaunes fluo (pas du tout artificielles c'est certain) et qui goutaient le Mr. Freeze congelé (miam!).

Le trek se terminait au village de Bada. Là une voiture nous attendait pour nous ramener à Jinghong à travers une petite route sinueuse longeant des plantations de thé. Nous sommes revenus à la nuit tombée à notre hôtel, bien contents de prendre une douche. Michel et moi n’avions pas faim mais les enfants sont sortis manger des brochettes (ils ont un circuit établi en genre de petite routine et qui commence invariablement pas un pop corn sur la route vers les BBQ. Ensuite le premier arrêt est pour le marchand de pommes de terre qui les reconnait et leur prépare tout de suite leur commande. C’est par la suite le tour des brochettes diverses et, pendant qu’elles cuisent, l’achat de jus de lime chez le jeune homme avec les cheveux qui bougent quand il « shake » la mixture. Ils terminent leur repas par des genres de crêpes frites aux bananes avec coulis de lait concentré sucré, faites adroitement par un couple de birmans. Et, en revenant, il y a un arrêt pour acheter une glace à la banane.) 




Ils sont débrouillards, les enfants, et Jinghong est une ville facile pour se déplacer et se repérer. Nous n'étions donc pas inquiets du tout!


Jour 2 chez les Bulang

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[Note du photographe: Scène typique de la campagne profonde Xishuangbannaise -- les paysans utilisent presque exclusivement la moto, seul engin pouvant pratiquer les sentiers, pour se déplacer, ainsi que leurs moissons]

C’est véritablement au son de toute la basse-cour que nous nous réveillons. Le déjeuner nous attend, des nouilles mélangées avec des œufs brouillés. Les bols sont énormes et on arrive à peine à manger le quart des nôtres. Il parait que c’est bien vu pour les chinois de laisser de la nourriture dans les assiettes (dixit Phoebus). J’ai de la difficulté à me faire à cette idée et je suis vraiment triste de voir la quantité de nourriture que nous sommes incapables de manger à chaque repas. J’espère, au moins, que ça nourrit ensuite les cochons, mince consolation!

[Note du photographe: Il faut vraiment être timide pour refuser de jouer avec Catherine! (Et vous aviez remarqué Pleasant Goat?)]

Avant de partir vers d’autres villages, nous visitons le petit monastère et la pagode du coin. C’est très joli et paisible. Par la suite, c’est une bonne journée de marche à travers la jungle qui nous attend. On s’arrêtera pour diner dans un autre petit village Bulang. Ici, les enfants ont peur de nous et c’est difficile de les approcher. Ils ont tous l’air d’enfants abandonnés de la jungle, dépenaillés, à moitié nus et morveux. Catherine arrive même à en faire pleurer deux juste en leur souriant…ceci dit, les gens sont vraiment gentils et nous prenons une bière avec le propriétaire du « dépanneur » du coin, assit dans la rue sur des tabourets. Il y a des tas de bébés poussins et d'adorables bébés cochons partout. Nous profitons de Phoebus pour oser gouter à des tas de trucs avec des emballages qui ne nous permettaient pas de savoir exactement si ça se mangeait ou non (gomme au blé, jus de tamari, gelée de litchi...)

Dernier segment de marche plutôt sportif en montée et on arrive dans le village de Manwa, village où nous passerons la nuit. On s’installe dans la famille qui nous accueille et Phoebus va chercher des trucs pour que les enfants puissent pêcher dans l’étang du village. C’est donc avec des canettes vides de Red Bull chinois en guise de moulinets, des branches de bambous en guise de canne et des pailles à la place des flotteurs, que les enfants ont taquiné le poisson. À défaut de mordre, c’était bucolique à souhait. 



Retour à la maison de nos hôtes en zigzagant à travers les cochons. Le souper sera copieux (trop!) et Michel, politesse toute arabe oblige, n’osera pas refuser les nombreux verres de rice whisky qui lui seront offerts (j’arrive même à lui faufiler mon verre en douce, le rice whisky de nos hôtes goutant un savant mélange d’eau sale et d’alcool à friction). La soirée se termine dans la « cuisine », autour du feu. Les femmes ont des enfants qui dorment sur leurs genoux, le maïs sèche à nos pieds et nous mangeons des graines de citrouille grillés et des arachides rôties. Dehors, les étoiles sont incroyables (nous voyons Jupiter qui brille de tous ses feux) et c’est à côté d’énormes sacs de riz que nous dormirons ce soir, pour une autre nuit, chez les Bulang.

Plus profondément dans le Xishuangbanna - Jour 1

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Bon, c’est bien beau de profiter illégalement de la piscine de l’hôtel cinq étoiles de la ville, de manger des brochettes sur le bbq tous les soirs, de déguster des sublimes ananas à toute heure du jour, de glander au café Banna en buvant de la bière pas chère, de faire des ricochets avec des roches plates dans le Mékong, de lire les livres en français trouvés dans un autre café (toujours drôle d’ailleurs de voir les livres qui sont laissés par d’autres voyageurs dans des coins obscurs de la planète- Olga, j’ai même eu la chance de lire un livre de ta maman!) et de déguster toutes les saveurs de crème glacée de la Chine, mais ce n’était pas vraiment pour ça que nous étions venus dans ce coin du Yunnan. 

Ce que nous voulions faire c’était de marcher un peu à travers les plantations de thé et les nombreux villages des minorités culturelles qui foisonnent dans cette région. Sur ce coup-ci, nous avions, de prime abord, bien envie de nous débrouiller seuls comme des grands. Mais, après lecture et consultation d’experts, force nous fut de constater que pour des occidentaux ne parlant pas du tout chinois, c’était très hasardeux voire même impossible comme aventure. Hasardeux car il n’y a pas vraiment de cartes des sentiers, que rien n’est indiqué et qu’il n’y a aucune installation pour dormir ou pour manger, à part chez l’habitant… et que l’habitant, et bien il a d’autres chats à fouetter que d’attendre au coin de la rue la gentille famille de touristes qui aimerait bien jouer à Mime-moi quelque chose avec lui.

On a eu beau retourner ça dans tous les sens, rencontrer les trois guides qui font des circuits dans les villages, tergiverser et, surtout, s’indigner des prix exorbitants des formules de trek qu’offrent les trois seuls cafés-qui-parlent-occidental (les touristes Chinois ne font pas de trek) de Jinghong (parait que l'argent est redistribué dans les villages), nous avons tout de même fini par prendre un guide pour une virée de trois jours, deux nuits à travers les villages des minorités Bulang.

Phoebus, (c’est le nom anglais que notre guide s'est choisi et je suis vraiment déçue d’avoir oublié de lui demander la raison de ce choix!) a donc été, après marchandage, l’heureux (!) élu pour nous révéler les secrets les plus intimes des gens de la région. Nous l’avons choisi parce qu’il parlait bien anglais et qu’il avait l’air gentil, des critères qui en valent bien d’autres.

Nous sommes donc partis tôt mercredi matin, avec notre attirail léger de voyage et un peu d’appréhension aussi parce notre dernière expérience de guide nous avait un tantinet échaudés.

Dans un premier temps, c’est en autobus que nous avons rejoint le village de Xiding où il y avait un marché (chouette, moi qui adore les marchés). Et, pour une fois que j’avais un authentique chinois sous la main qui pouvait, enfin, me dire le nom et l’usage que tout ce que je voyais, je ne me suis pas gênée!

Des vers blancs dans les bambous que l’on bouche avec des feuilles, des racines de lotus, des blocs de tofu gélatineux et oui, les alvéoles de ruches remplies d’abeilles géantes et de larves grouillantes, c’est bien pour manger les abeilles par la suite (grillées, very delicious de me dire Phoebus).

[Note du photographe: Oui, ce sont bien des vers que vous voyez dans le bol. Vivants, évidemment!]




[Note du photographe: Abeilles, guêpes et larves variées... Catherine détournait assurément le regard.]

J’y serais restée des heures! Mais, bon, le diner nous attendait dans un autre petit village, à une heure d’autobus, et ensuite quelques heures de marche devaient aussi se faire avant de trouver le repos du trekkeur dans le village de Zhang Lang. Alors pas trop de temps à perdre pour parler popote!

D’emblée, ce qui était vraiment agréable dans toute cette journée, c’était de pouvoir parler avec Phoebus (qui se voulait, selon ses dires, un pont entre la culture chinoise et les autres cultures) de tout ce qui nous étonnait, questionnait ou interpellait en Chine. Phoebus était content de répondre à nos questions et nous en posait aussi, ce qui permettait d’avoir une vraie conversation. De plus, il connaissait des tas de trucs sur les plantes, arbres et fleurs que nous voyions. Nous avons donc marché en goutant des fruits nouveaux, en sentant des feuilles, en observant des insectes. 


Le sentier était beau et serpentait entre quelques villages, quelques champs de riz, des cultures de thé, des rangées de bananiers et des tas de cannes à sucre. Le super moment de cette marche fut lorsque, à mi-chemin, un camion s’est arrêté pour nous proposer de nous embarquer dans sa boite en arrière. Sur un sentier cahoteux au possible, on a rigolé comme des fous en nous penchant régulièrement pour éviter les branches et en s’agrippant fermement pour éviter de tomber par-dessus bord. Parait que c’était mieux que La Ronde, de dire les enfants.

Premier dodo dans une maison de minorité Bulang. Les maisons Bulang sont construites en bois sur deux étages. Le premier étage est complètement ouvert et sert de rangement et d’abri pour les animaux (surtout des cochons car la région est véritablement le royaume du cochon noir) et le deuxième étage est la maison proprement dite avec un espace cuisine (une petite pièce avec un feu de bois au centre, quelques tabourets à ras le sol pour s’assoir autour du feu et deux-trois chaudrons) et une grande pièce qui sert à la fois de salon et de salle à diner et dans laquelle tout le monde dort, par terre. Ce sont des pièces très sombres car il n’y a pas ou très peu de fenêtres afin d’empêcher les démons de rentrer dans les maisons (parait que c’est super efficace). Les toilettes sont sur la terrasse dehors et le maïs et les feuilles de thé sèchent un peu partout.
Nous avons soupé avec cette famille. Phoebus traduisait nos questions, commentaires et réponses de nos hôtes, ce qui donnait une petite ambiance bon enfant à la soirée. Nos hôtes étant bien impressionnés par nos grands enfants et nous avons bien failli arranger un mariage entre Nicolas et leur seconde fille, même si le principal intéressé ne semblait pas trépigner de joie à l’idée d’un avenir de cultivateur de thé (la fille était jolie par contre, même si elle ne fut que furtivement aperçue). Nous avons aussi porté des toasts avec du rice whisky, qui est en fait un alcool fait avec du maïs fermenté (cherchez l’erreur). Ici, tout le monde concocte le sien (avec plus ou moins de succès) et il accompagne tous les repas, matin, midi et soir (ouille pour les estomacs).

Finalement, c’est en chantant que nous avons terminé la soirée (aucun rapport avec le rice whisky) et comme nous n’avons toujours pas de guitare (snif), ça sonnait sans aucun doute pas mal cacane notre affaire. Mais bon, nos hôtes avaient l’air de trouver ça très drôle et devaient penser que les fausses notes étaient partie intégrante de la culture québécoise. On s’excuse.

Dodo en groupe dans la pièce commune… les enfants ont adoré. Les grands dormaient sur de la paille et nous sur des matelas du genre dur avec ressorts dans le dos. Mais, bon, on était pas là pour faire nos chochottes!