Le chant des moines

3 oct. 2011



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27 septembre, Pokhara

Après une longue marche vers la vieille ville de Pokhara, nous essayons de trouver un transport local pour se rendre dans un des deux camps de réfugiés tibétains qui se trouvent en ville. Celui qui nous intéressait était le plus gros des deux. Celui-ci possède un monastère où les moines exécutent un genre de prière chantée entre trois heures et cinq heures de l'après-midi. Il faut tout de suite vous dire que pour se rendre dans ce camp, c'est bien plus compliqué que cela en a l'air. 
Tout d'abord, on doit trouver le terminus d'autobus pour prendre l'autobus en question.
Par la suite, on doit essayer de communiquer avec un des "contrôleurs" pour trouver quel véhicule on doit prendre.
Pour finir, on embarque sans trop savoir si on va dans la bonne direction au milieu de tous ces gens qui nous dévisagent en étouffant un rire. C'est quand même rare de retrouver une famille de six étrangers dans leurs autobus.

Alors collés par une chaleur étouffante, nous nous regardons avec de grands sourires qui veulent dire: "on est quand même cool d'avoir réussi!" Bon, ce n'est pas du tout fini, car un regard sur la carte de notre guide (pas Dawa, le Lonely Planet) nous fait remarquer, que nous nous dirigeons dans la direction opposée! L'instant de panique passé, nous rions de notre erreur et commençons à discuter avec le contrôleur de l'autobus, pour trouver un autre transport qui, lui, nous déposerait à la bonne place. Pendant que l'on s'explique, plusieurs locaux nous regardent en riant un peu. Finalement ce n'est pas trop grave, se dit-on, on va avoir fait un tour d'autobus au Népal et c'était vraiment amusant. Alors, on se retrouve tout bonnement dans une rue, qui parait-il, possède un autre arrêt d'autobus qui nous mènerait au camp si désiré (bon, là j'exagère, il faut dire que j'étais un peu de mauvaise humeur car on allait dans un endroit ultra touristique, d'après moi, donc ce n'était pas si désiré que cela).


Alors, on regarde un peu partout, cherchant du regard un autobus susceptible de nous mener à bon port. Je crois que les chauffeurs de taxis ont très bien pu déchiffrer nos regards voulant dire: "je cherche à me rendre quelque part mais je suis, genre, pas trop sûr comment". Comme de fait, on se faisait héler à tous les coins de rue: "hey Namaste! Where are you going?!" On leur expliquait que l'on voulait aller dans le camp tibétain NORD. Puis là, ils disaient que oui, ils savaient c'était où et ils nous donnaient un prix. On leur explique que l'on est six mais, ils ne semblent pas comprendre que l'on ne rentre pas dans leurs minis taxis. Habituellement c'est là que s'arrête la discussion. Un moment donné, nous nous sommes résignés, et oui, nous avons pris un taxi. Donc, nous avons seulement à attendre un peu pour nous faire aborder. Justement on nous klaxonnait pour nous embarquer. Le temps d'acheter un peu de samosas, de l'eau et de marchander le coût du taxi, on 


était embarqués.


Ce genre de véhicule est conçu pour prendre au maximum cinq personnes, avec le chauffeur, mais je ne sais pas par quel exploit, nous avons réussi à nous entasser à sept! Quatre sur la banquette arrière et deux sur le siège du co-pilote un par-dessus l'autre. Et je vais tout de suite briser vos illusions, nous étions tous très confortable, sans blague. Alors, le conducteur démarre son taxi et nous emmène cinq minutes plus loin devant un genre d'arche dans un trou perdu (pas du tout où l'on voulait aller). Mon père le regarde avec le regard qui veut dire: "niaise moi pas, là". Le chauffeur s'excuse en disant qu'il ne le savait pas et qu'il croyait que c'était là que l'on devait se rendre. On lui demande de nous mener au bon endroit et on le lui montre sur la carte. Finalement, on sort de la ville pour s'arrêter un peu plus loin devant le vrai camp. On sort du taxi, mon père paie la somme convenue du départ, et là, le chauffeur en demande plus. Il commence à nous faire une scène en disant qu'il ne savait pas c'était là, il croyait que c'était moins loin, etc. Il pleure quasiment, il dit qu'il veut partir sans que l'on paye. Mon père lui explique que c'était le montant convenu et tant mieux s'il ne savait pas c'était où, maintenant il le sait pour la prochaine fois, il devrait au contraire le remercier car il est devenu un meilleur chauffeur, vous voyez le genre. Alors le chauffeur empoche le montant convenu et part en disant qu'il est fâché. Nous, nous étions très contents de ne pas s'être fait trop arnaquer.

Enfin, nous n'y croyons plus vraiment, nous étions arrivés dans le fameux camp (même moi j'étais content). On se promène un peu. C'est propre, il n'y a pas beaucoup de monde et il n'y a aucun touriste. Ma mère, qui m'a entendu chiâler pendant la moitié du trajet, me disait quelque chose du genre: " ouais, je sais, désolée que cela soit si touristique". Un peu blessé dans mon orgueil, nous rentrons dans un temple après avoir pris soin d'ôter nos souliers et demander la permission à un moine.

On rentre et c'est tout simplement ultra intimidant! Un mur complet de petites statuettes de Bouddha identiques nous faisaient face et tous en indien, des moines chantant, soufflant dans des trompes et tapant sur des tambours. Dans le fond, les apprentis faisaient leurs "devoirs" et se parlaient entre eux. Ne sachant pas trop quoi faire, nous nous sommes assis un peu dans le fond, sur des bancs, pour assister un peu à cette incroyable cérémonie. Ce "un peu", fut vite transformé en heure et demie. Le temps, dans cette ambiance de chants et de musique, passait extrêmement rapidement. De temps en temps, je me perdais dans mes pensées puis je fixais un moine en particulier pour examiner ce qu'il faisait exactement. Je regardais aussi les murs peints et je m'imaginais au milieu de ces moines en train de chanter moi aussi. Les occupations ne manquaient pas et j'étais fasciné par ces chants. Et tout d'un coup ça a arrêté. Tous les moines sortirent et après dix minutes, il ne restait plus âme qui vive dans la salle. 


C'est probablement l'heure qui a passé le plus rapidement de ma vie.

3 commentaires:

bryv a dit…

Voilà que tu m'as beaucoup ému Nicolas! Une très belle description, en crescendo, en partant de la confusion totale pour arriver à ce magnifique moment de recueuillement. Ce chant est aussi émouvant que du grégorien. Comme quoi les dieux aiment la musique qui vient du coeur..., qui se chante en choeur.

P.S. Je ne veux pas te faire injure, Nicolas, mais je pensais lire ta mère...Et, bien sûr, il faut prendre ça comme un compliment!!!

Unefemmelibre a dit…

Un "chant" tout à fait hypnotique. Je comprends que l'heure ait passé rapidement. On se croirait tout à fait ailleurs, et en fait, c'est tout à fait ailleurs!!! Beau récit.

Melanie a dit…

Mon enfant préféré! Toi tu chiales!? Pas possible!!! Sois gentil avec ta mère!!!
xxxx

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