Dans la cour de récré

30 août 2011



Dernier tour de piste à Dali ce matin les corps endoloris de blessures de la guerre d'hier : avant bras meurtris pour l'une, genou qui se réveille du pied gauche, coups de soleil pour les deux malgré les précautions... Les enfants, eux, sont pimpants! Nous qui nous sentions presque coupables de les avoir trainés si loin hier...

En passant tout près des murs d'une école en plein centre de la ville, nous sommes attirés par les cris des enfants, en chœur, qui rythment ce qui semble être un exercice quelconque; à travers une première grille, on aperçoit des dizaines d'enfants alignés, ce qui nous pousse à percer vers l'intérieur des murs, tout fouineurs que nous puissions nous sentir.

Et ça vaut le coup. Collègues concernés, prenez note : on fusionne savamment ici l'éducation physique et l'éducation à la citoyenneté : des militaires (des vrais, pas juste des profs d'éduc qui se croient) se partagent en pelotons les quelque deux-cents élèves de l'école. Au menu : exercices... militaires.

Fascinant. On se demande quoi penser devant une telle démonstration. De toute évidence, ces élèves sont drillés depuis longtemps à la chose. Depuis les premières années d'école, à en juger par leur capacité à garder le décorum. (Sauf un, que l'on enverra faire le piquet en saluant tout en haut des marches.) Que leur apprend-on ainsi, sinon l'obéissance aveugle à l'autorité, la haute discipline citoyenne, et la perception d'être un soldat du peuple comme tous les autres, ni plus haut ni plus bas que le voisin? Pour une nation de 1.3 milliard d'habitants, c'est peut-être une nécessité... y a-t-il vraiment de le place ici pour les crises de diva, les quinze minutes de gloire et les «je-ne-suis-pas-un-numéro barre oblique on-est-tous-différents»? On se pose bien des questions et on se demande quoi penser, parce que, malgré tout cela, à un enfant par ménage, à un enfant par grand-parent même (faites le calcul!), ce qui fait que les enfants sont considérés comme un bien ultraprécieux, ne favorise-t-on pas un peu les enfants-rois? Paradoxes, paradoxes, et c'est ce qui fascine.

Vous pardonnerez la qualité des photos, mais à peine l'appareil sorti, on s'est fait avertir par de grands gestes de bras du caporal à l'avant plan. Il a fallu attendre qu'il ait le dos tourné pour tirer furtivement un cliché ou deux. (Ne t'en fais pas Maman, ils ne fusillent pas les familles. Encore.)


Mais on se console de les voir, à la pause-diner, déferler par centaines dans les rues de la vieille ville jusqu'à les envahir momentanément. Et là, ce ne sont plus les miliciens stoïques de tout à l'heure; ouf, ce sont encore des enfants!




[Oh, petit avertissement : comme Laurence et moi ne nous donnons pas nécessairement le mot pour savoir qui écrit quoi (on écrit surtout ce qu'on a envie d'écrire), on se répète parfois... En espérant que ce ne soit pas trop rasant!]

9 commentaires:

Michele a dit…

Rasant ? Au contraire, c'est formidablement fascinant d'avoir le point de vue de tous, enfants/ados (qui écrivent comme des écrivains) compris.

Émilie a dit…

D’un bout à l’autre de la planète, nous avons des réflexions similaires! Aujourd'hui, en me questionnant sur l'avenir du Québec (tout en faisant mes lectures pour mon mémoire qui traite des violences sexuelles commises par les soldats canadiens), je me disais qu'un des plus beaux cadeaux que l'on pouvait s'offrir c'est un pays sans armée...

P.S. Que font les poules dans le sac? Du jamais vu!

lapretentieuse a dit…

Très intéressante réflexion issue de cette pause cour d'école...

Gautse a dit…

En fait ça se passe à plusieurs endroits dans le monde ce genre de truc... :-) Mes amis guinéens, incluant mon chum, m'ont tellement parlé de ces saluts et marches militaires qu'on leur imposait à la petite école... :-) lol Est-ce eux l'exception??? Ou est-ce l'occident??? :-o

Valéry

Martin Laliberte a dit…

Ici, c'est la rentrée à la Cité et ailleurs bien sûr. Vos enfants doivent jubiler de s'en soustraire mais j'imagine que vous les attendez dans le tournant ;-) Quel est votre plan de match à ce niveau ?

Fab a dit…

Non ce n'est pas rasant....2 points de vue c'est toujours mieux qu'un seul....Quand je vivais à Cuba je me posais les memes questions que vous!!!!! Tout un débat de conscience...on finit par se dire: Faut pas juger, juste observer.......

Rex a dit…

mais on voyage différemment par les yeux de Michel ou par ceux de Laurence ou des garçons...! ce qui rajoute à mon plaisir de vous lire!

Michel a dit…

On les attend dans le tournant, certes, mais aujourd'hui, lors d'une leçon très informelle sur le tableau périodique, un des enfants (qu'on ne nommera pas pour le protéger) a demandé que le cours soit plus... structuré!
On en reparlera sur le blogue, avec plus de détails, de cette école à la maison.

Michel a dit…

Ah, les poules dans le sac... elles semblent semer autant d'étonnement que pour nous! Photo prise au marché de Sha Ping, il semblerait que ce soit simplement un moyen fort efficace de les garder toutes ensemble ainsi que de les transporter aisément. Club des débrouillards 50, version Baï!

Enregistrer un commentaire